E019 État du parc locatif au Québec : enjeux et solutions
CHIA Talk #19 La santé du parc locatif au Québec
NOTRE PARC LOCATIF EST-IL EN SANTÉ? Quelle est son historique? Sont-ils âgés? Que ce soit une maison, un triplex, un quintuplex ou encore une tour d'habitation, qui gèrent et maintiennent ces bâtiments et ont-ils les moyens? Comment on se compare au voisin ontarien? Comment on se compare avec certains pays où la proportion des locataires est supérieure que celle au Québec? Marc-André Plante, M.A.P., directeur des affaires publiques et des relations gouvernementales de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec - CORPIQ et ex-Maire de Ville de Terrebonne 2017-2021, nous donne un portrait général sur nos défis en habitation et quelques pistes de solutions favorisant un meilleur équilibre entre les propriétaires et les locataires.
Le 19ème épisode du podcast Real Talk with CHIA a été diffusé le 5 avril 2023 et est rediffusé sur notre chaîne Youtube, voici sa transcription traduite :
-Bonjour à tous, je suis Chiayi Tung, votre animatrice pour le Franc-Parler avec Chia. J’ai le plaisir d’inviter le Directeur des Affaires Publiques et Relations Gouvernementales chez CORPIQ ; Marc-André Plante à va venir nous jaser des défis que nous avons comme société en termes de l’habitation.
-Bonjour ! Très heureux de me joindre et d’être avec vous aujourd’hui.
-Oui, moi également, moi également ! Comme on sait que les défis en habitation sont très nombreux, comme on le sait aussi que vous êtes politicien retraité. Vous avez passé votre vie, très très impliqué dans la vie des citoyens, en défense, en protection de nos résidents. Alors merci. Donc, certainement vous avez un bagage vraiment très profond pour nous partager toute sorte de sujets. Alors ce que je me suis dit aujourd’hui, que ça valait le coup d’un portrait plus général et plus factuel sur la santé de notre parc locatif. Qu’est-ce que vous en pensez ?
-Vous savez, au Québec, on a 1.5 millions de logements locatifs. Alors on exclut les condos, les copropriétés. Là, on est vraiment dans le locatif traditionnel. Vous savez, quand on se compare avec le reste du Canada, il y a une proportion beaucoup plus grande de locataires, ici au Québec. C’est plus de 40% des gens, donc au Québec. Et même si dans le reste du Canada, la proportion augment mais ici, au Québec, c’est historique. Il y a toujours eu quand même plus de locataires, près de 2 sur 5 donc c’est une proportion assez élevée. On a un parc locatif qui est d’abord historique, on a beaucoup de logements qui ont été construits avant 1980, alors 60%. Donc, on a un parc, que je dis souvent, qui a besoin qu’on s’en occupe, qui a besoin d’amour !
-Avant d’en aller là, avant d’aller dans l’âge et la généralité de ces immeubles locatifs, je voudrais d’abord savoir quelles sont les proportions de ces immeubles publics et privés.
-À l’heure actuel, au purement privé, c’est environ 90%, donc, des logements locatifs au Québec auxquels il y a un propriétaire privé. L’autre 10%, c’est évidemment des habitations à loyer modiques, sous des offices municipaux d’habitations, y a des coopératives d’habitations. Il y a des projets d’habitation à but non-lucratif. Donc, ça représente environ 10%. C’est une proportion un peu moins élevée, par exemple, qu’on a en Ontario. Mais quand je dis un peu moins, c’est quelques points de pourcentage. Mais globalement, le secteur privé est quand même, là, présent à près de 90%.
-Je voudrais aussi connaître les proportions des tailles des immeubles. Parce qu’en fin de compte les gens pourraient penser que les propriétaires, ils sont très riches. Mais pas forcément parce qu’en plus des tours d’habitations de plus de cent logements, on a aussi les maisons locatives, on a aussi des duplex, des triplex. Est-ce que j’ai raison ?
-Non seulement on a raison, mais en plus on se distingue beaucoup du reste du Canada. 37% des propriétaires au Québec ont cinqplex et moins. Donc, 5 portes et moins. Donc, ce sont des gens qui ont nécessairement un autre emploi. Et souvent, ils ont des propriétaires occupants, pas toujours. Des fois c’est leur bas de laine, leurs fonds de pension. Ils ont hérité, des fois, de leurs parents un bâtiment, qu’ils continuent, donc, de gérer avec des locataires. Mais la très grande majorité, je dis 37%, ça c’est le Québec, mais en Ontario c’est 7%. Alors ici au Québec, on a beaucoup de petits bâtiments, des plex entre guillemets, construits en bois, avec l’insonorisation pas toujours comme on l’a dans les nouveaux bâtiments en béton, très différents du reste du Canada, où on a plutôt de la densité, plusieurs étages, des ascenseurs. Ici, au Québec, on est très différents dans l’aménagement, effectivement.
-Oui, absolument et d’ailleurs, je pense que c’est aussi pour cela, une des raisons pour lesquelles que CORPIQ existe. Est-ce que vous pourriez parler rapidement de la mission de CORPIQ ?
-La Corporation des Propriétaires Immobiliers du Québec, la CORPIQ, on existe depuis le début des années 80. Depuis la Constitution du Tribunal administratif du Logement. On est une association à but non-lucratif. On appartient à tous les propriétaires qui sont membres. Et donc, il y a une volonté démocratique. Donc, l’association elle n’appartient pas à Marc-André Plante, elle appartient à ses membres. Et notre mission, c’est de refléter puis de représenter les propriétaires locatifs sur les enjeux de leur gestion quotidienne. Les propriétaires et les gestionnaires aussi. Mais je voudrais qu’on ait aussi une approche de plus en plus préoccupante du client, donc des locataires. Parce que, vous savez, quand on gère une industrie, on a des clients, ici au Québec ce sont des locataires dans notre industrie. Alors on est vraiment dans une approche de dire ; il faut trouver l’équilibre. L’équilibre dans un marché, l’équilibre pour le propriétaire. Un environnement qui est stimulant. Alors c’est vraiment notre mission comme organisation. On doit représenter tous les propriétaires : les petits, les moyens les grands, les grandes corporations. Alors c’est vraiment notre objectif.
-Excellent. Est-ce que vous pouvez nous parler aussi de combien de membres que vous représentez actuellement ?
-On représente 30 000 membres et gestionnaires. Donc, ça peut être des propriétaires et des gestionnaires qui sont leurs représentants. Évidemment, on a des grands propriétaires : le plus grand au Québec à 4500 logements. Mais on a aussi des gens qui ont un duplex, donc qui habitent avec un seul locataire. Et notre objectif, c’est d’appuyer parce que les lois sont quand même relativement complexes au Québec. Il faut connaître tous les enjeux, l’environnement, comment procéder. Vraiment, il y a un encadrement législatif qui est important au Québec. Alors, on est là pour faire de la formation, éduquer, accompagner les propriétaires dans tous les défis de la gestion immobilière dans le secteur locatif.
-Moi, je trouve vos outils, très, très utiles. Ils sont accessibles en ligne. Donc, merci beaucoup. Donc, revenons à nos immeubles, à notre parc locatif. Là, on comprend que 10% appartient au public et 90% restent privé. Alors, il y a une grande majorité des immeubles qui ont été bâtis il y a un certain moment. À part les immeubles récents, quel est l’état actuel de ces immeubles qui ont été construits il y a un certain moment ?
-C’est clairement un parc locatif qui a un déficit d’entretien. On ne cachera pas qu’on évaluait quand même, en 2016 et on annualisait depuis ce temps, aujourd’hui, en 2023, un déficit, là, qui dépasse les dizaines de milliards. Principalement, pour plusieurs raisons. D’abord, les politiques publiques dans le secteur locatif qui ont été développée, on pas toujours nécessairement développé, encouragé la rénovation en amont. Et donc, les investissements continuent. Et donc, avec un parc où plus de 60% qui a été construit avant 1980, donc on est dans la quarantième année plus. Ben, c’est des bâtiments que là c’est les gros travaux. Et malheureusement, les règles du jeu n’ont pas nécessairement mis de l’avant l’importance de l’entretien et de refléter ses coûts-là, dans le prix des loyers. Ce qui fait que beaucoup de propriétaires ont souvent visé à maintenir en état. Mais je le dis toujours, quand on sous investi dans l’entretien de notre parc locatif, un jour ou l’autre, ça finit par nous rattraper. Et ça vient aussi de méthodes de calcul, de fixation de loyers, d’ajustements annuels, qui dans les faits ne reflètent pas bien cette volonté-là qu’on devrait avoir pour entretenir le parc.
-Ben tout à fait. Juste en comparaison avec la gestion des copropriétés, par exemple.
-Même exemple.
-Chaque syndicat de copropriété doit, selon la loi maintenir la santé financière et la santé physique des immeubles, n’est-ce pas. Et pour ça, tout le monde contribue à un fonds. Et que ce fonds-là est un fonds de prévoyance. Et pour vraiment maintenir la santé des copropriétés. Et dans les locatifs c’est chacun pour soi.
-Exact, et le fonds de prévoyance n’existe pas nécessairement. Mais en fait, si le propriétaire se dote de ça c’est parce qu’il faut une assurance de rencontrer que son investissement va s’amortir selon les certaines années. Mais à l’heure actuelle, les politiques de calcul d’amortissement pour les rénovations majeures, ben ça peut prendre ou 40 ou 50 ans. Alors, vous refaites une cuisine et vous l’amortissez sur 30, 40 ou 50 ans.
-Mais on s’entend qu’une cuisine après 10 ans, c’est démodé et puis faut recommencer !
-Je dis toujours à ma conjointe, si je lui annonce la bonne nouvelle : on refait la cuisine aujourd’hui mais on va la financer sur 40 ans. Elle va dire : on va la revoir d’ici là ! C’est pour ça que je dis qu’il faut absolument que l’investissement concorde avec la durée de vie. Et malheureusement, en ce moment-ci, on encourage le moins bon comportement. Le comportement dit, on va, excusez l’expression : on va spatcher. On va garder ça correct, sécuritaire. Mais je pense que les locataires, ce qu’ils souhaitent, c’est qu’on se donne un environnement qui est renouvelé qui est sain de bon logement. Et pour ça, il faut qu’il y ait une équation entre le prix que je vais payer et celui que je peux, donc, demander. Malheureusement, on dirait au Québec qu’ils protègent trop le prix le plus bas vers le bas, mais ça contribue à maintenir des logements qui sont parfois dans un moins bon état. Et c’est ça qu’il faut changer comme culture, comme façon de faire.
-Absolument, et en parlant de cette culture-là, j’en sais de quelque chose parce que en tant que courtier immobilier spécialisé en transactions multifamiliales, souvent je peux accompagner les clients pour faire les visites des appartements. Et ce n’est pas toujours, toujours rose. L’état des immeubles et la qualité des locataires ne sont pas toujours au rendez-vous. Justement parce que le propriétaire, il n’arrive pas à amortir ses investissements très importants : cuisine, salle de bain, toiture, structure, fondations, façade. Il y a tellement de choses à faire, il y a tellement d’entretien à faire. Mais que vu que, financièrement parlant, ça en vaut pas la peine parce qu’on ne peut pas le cotiser d’une certaine façon, par les loyers très faibles. Donc, finalement, c’est les locataires qui en souffrent, qui vivent dans des milieux de vie plutôt patchy.
-Exact. En fait, c’est ça la réalité c’est qu’on est vraiment dans une conjoncture qui est décourageante. Donc, pour un propriétaire, la problématique c’est qu’on n’encourage pas la détention à long terme. C’est à dire que la personne qui s’investit, quand on rénove un bâtiment, malheureusement, on voit beaucoup dans le marché où on voit des gens dire : ben moi je vais rénover puis je vais revendre. Je vais tout de suite prendre le bénéfice. Moi, je pense qu’il faut encourager plutôt les comportements en amont. On rénove de façon continue, mais on détient à long terme. On s’engage, on crée une relation avec nos locataires. Une relation de confiance. Et pour ça, il faut se donner des règles du jeu qui permettent à ce que l’investissement, dit immobilier, soit intéressant pour le propriétaire. Mais en même temps je vais être clair, il faut aussi trouver dans le maché un équilibre. Un équilibre pour que les droits, que ce soit des propriétaires de logements locatifs et des locataires, il faut aussi trouver un balancier aussi équilibré. Il faut aussi éviter des situations où par exemple ; je vais reprendre votre logement parce que je veux faire plus d’argent avec sans raison valable, etc. Je pense que le système qui s’est créé au Québec, c‘est un système où tout le monde a des droits, puis peut les faire valoir dans un équilibre. Ce qu’il faut éviter, c’est que ces lois-là viennent privilégier les moins bons comportements. Celui qui délaisse son bâtiment parce qu’il ne voit pas d’intérêt à l’entretenir. Jusqu’à ce qu’un jour on se dise est-ce qu’on détruit et qu’on reconstruit complètement à neuf ?
-C’est vraiment triste.
-Il faut pas en arriver là. Il faut plutôt agir de façon continue. Et c’est là-dessus que la CORPIQ travaille, vraiment d’amener des règles du jeu et des lois, des encadrements qui valorisent la détention à long terme, et donc la personne qui s’investit comme propriétaire développe une belle relation avec ses locataires.
-Ah oui, tout à fait, de trouver le juste milieu.
-Exact.
-Pour les deux. Un des chocs culturels que j’ai eus lorsque je suis arrivée, il y a 25-26 ans, de Taiwan jusqu’au Québec. En fin de compte je suis une native de Taipei qui est la capitale de Taiwan. Et vous savez la pratique courante à Taiwan, c’est qu’il y a aussi beaucoup, beaucoup de locataires. Pourquoi, parce que les immeubles sont relativement dispendieux. Alors, tu sais, un petit 500 pieds carrés, c’est facilement 1.5 million. Donc, très peu de gens qui ont accès à devenir propriétaire, donc on a beaucoup, beaucoup de locataires. Par contre, à Taiwan, qu’est-ce qu’on pratique pour cette relation entre propriétaire et locataire ? C’est que lorsqu’on s’engage en tant que locataire, c’est de prendre un logement, on va donner trois mois de dépôt de sécurité, pour démontrer au propriétaire, que moi, je suis quelqu’un de responsable et je suis prête à investir ce montant-là pour garantir en quelque sorte que je vais bien maintenir le logement dans son état actuel. Et à la fin, le dépôt est retourné parce que, c’est justement, je deviens une partie prenante dans la santé de cet immeuble.
-Depuis le nombre d’années, la CORPIQ fait des représentions notamment pour le dépôt de garantie. Mais vous savez la jurisprudence est venue reconnaître à ce que le locataire puisse proposer à son propriétaire un dépôt de garantie. À l’heure actuelle par exemple, si vous avez des animaux, puis que le propriétaire est plutôt inquiet ou ne souhaite pas les accueillir, le locataire pourrait arriver et lui dire ; ben écoutez je vous propose en signe de bonne foi un dépôt de garantie. Évidemment, la jurisprudence ce qu’elle dit c’est que cela doit être volontaire du locataire. Et, ce n’est pas uniformiser dans l’ensemble, pour chacun des locataires. Évidemment, moi, je pense qu’il faut avancer un petit peu plus loin, puis j’aime ça que vous dites que vous êtes arrivée au Québec. Vous avez fait le choix comme nouvelle arrivante, comme locataire. Puis, je vais en parler parce que pour moi ça me parait important. Vous savez que dans les cinq premières années d’arrivée au Québec de nouvelle arrivée d’un immigrant, 83% sont locataires. Donc, qui dit immigration dit locataires au Québec, surtout dans les premières années. L’une des grandes difficultés surtout dans un marché extrêmement serré, comme on le voit : taux d’inoccupation très bas, ben beaucoup de nouvel arrivant ont de la difficulté à avoir une côte de crédit, ils n’ont aucun historique de crédit. Ils n’ont pas d’endosseur nécessairement, pas de colocataire pour les aider, je pense notamment aux étudiants. Ils n’ont pas d’historique d’autres propriétaires qui peuvent les recommander. Et souvent pour ces nouveaux arrivants, ou même ces étudiants étrangers, le dépôt de garantie c’est une façon d’offrir une sécurité pour le propriétaire. Et moi, je pense que dans nos lois il va falloir évoluer parce que des locataires qui ont des obstacles de la vie. Je pense, par exemple, à un homme qui divorce. Une mauvaise passe dans sa vie. Puis, il a une enfant, puis il vaut avoir la garde partagée, il veut prendre ses responsabilités mais il a fait faillite récemment. Puis, ça va pas bien sa vie mais il veut repartir ; se retrouver un emploi, etc., etc. Mais là, il faut qu’il se classe pour se retrouver un logement. Et là, faute de crédit, c’est plus difficile. Moi, je pense qu’on doit dans des situations, au Québec, évoluer. Le dépôt de garantie, c’est une façon de minimiser les risques pour le propriétaire et de responsabiliser aussi le locataire, dans le fait que je prends un bien et je vais le redonner dans le même état. Ça fonctionne dans plusieurs législations. Et ça fait partie des changements législatifs qu’on aimerait, au Québec, voir venir. Puis, moi je pense, que pour les immigrants pour plusieurs, ça faciliterait la recherche de logement pour eux, parce que malheureusement, lorsqu’on arrive au pays, on connait pas les lois, on est déboussolé. On quitte notre pays dans des conditions pas toujours faciles. Et le logement, c’est notre premier quartier, c’est notre premier attachement au pays d’accueil. Puis, plus cet environnement-là va correspondre à nos besoins, mieux on va aussi s’intégrer et participer à la vie communautaire et économique.
-C’est ça. Je suis très, très, très d’accord avec vous parce que j’ai tout vécu ça. J’ai eu la chance d’arriver à l’université de Montréal. Puis, j’habitais dans la Tour des Vierges, donc j’étais très bien accueillie. Mais je ne peux pas imaginer, par exemple, que des immigrants qui arrivent avec toute une famille, ils doivent absolument trouver un quartier, identifier un quartier et un logement qui va correspondre à plusieurs critères. Où insérer les enfants ? À quelle école ? C’est beaucoup, beaucoup de casse-têtes. Et puis, si en plus, ils éprouvent des difficultés pour convaincre le propriétaire de leurs louer.
-Il ne faut pas en vouloir au propriétaire, parce que vous savez, le propriétaire, bien souvent lui a son hypothèque à la fin du mois. Parce qu’il y a toujours un effet domino.
-Absolument.
-Un effet de risque. Alors un locataire qui ne paie pas, qui donc en défaut de paiement. Ça a des conséquences financières, qui depuis un an, avec la hausse des taux d’intérêts, les marges de manœuvres des propriétaires, là, y en a vraiment pas.
-Vraiment pas.
-Et donc, la prise de risque là elle doit être minimisée. Moi, je dis souvent au locataire, proposez un petit montant, même si c’est un petit montant. Je dis souvent un petit montant, c’est symbolique mais vous envoyez un message que vous serez un locataire responsable. Que vous êtes prêt à contribuer à préserver cet environnement-là. Et donc, d’une certaine manière, le propriétaire, c’est pas le montant d’argent qui va l’intéresser, c’est l’engagement. Et ce qu’il recherche ce sont des gens qui sont responsables. En fait, c’est pas l’argent, c’est le niveau de responsabilité qui est important.
-C’est le niveau de confiance.
-Exactement.
-Exactement.
-Mais c’est comme ça dans la vie et dans tout, là.
-Absolument. C’est juste que pour le moment, on voit qu’on est devant quelques défis au niveau des règlements, parce que on dirait que ces règlements-là, ça existe pour protéger les deux parties. Mais qui ne sont pas à jour, selon la réalité d’aujourd’hui. Donc, ça nécessite une mise à jour, comme nos bâtiments qui sont délabrés, ils ont aussi besoin d’une mise à jour.
-Au Québec, en fait, on a essentiellement les mêmes lois qu’il y a 40 ans.
-Ce n’est plus le même contexte.
-C’est juste le calcul des hausses de loyers, la formule de fixation des loyers, elle est basée sur des méthodes de calcul du début des années 80 où les taux d’intérêts étaient à 20%. Donc, c’est un autre monde, une autre réalité. Alors, nous on en vient à la conclusion ; on est pour une réforme majeure du secteur de l’habitation. L’objectif, ici, c’est pas l’enrichissement à l’extrême des propriétaires, puis d’abuser… Il n’y a aucun propriétaire qui pense comme ça. C’est de trouver le meilleur équilibre mais surtout de miser sur les bons, les meilleurs comportements : notamment l’entretien. Puis, je le dis toujours, l’investisseur, le propriétaire, là, il veut faire un peu d’argent, c’est normal, c’est son fonds de pension, donc, il veut que ça progresse. Mais, il veut pas nécessairement le faire en abusant des autres. Donc, il faut un équilibre et c’est ça qu’il faut retrouver dans le système. Puis, il faut que les gouvernements prennent aussi leurs responsabilités au niveau des clientèles plus vulnérables, avec des logements sociaux, plus abordables. Et là, cette mission-là, elle revient pas nécessairement au propriétaire privé parce que c’est pas leur mission à eux.
-En plus de toutes les rénovations majeures ou des entretiens réguliers, j’ai aussi passé hier toute la journée dans une conférence sur le ESG. Donc, le ESG existe depuis un certain nombre d’années. C’est juste que là pour les gros propriétaires d’immeubles, il va falloir commencer à déclarer, et puis, de respecter un certain encadrement à partir du 1er janvier 2024. Alors est-ce que vous prévoyez, chez CORPIQ, un certain impact ?
-À ce moment-ci, on surveille ça de près. Évidemment, on est toujours for anxieux par rapport à ces changements-là. Le défi qu’on a toujours, c’est qu’au Québec, on a 300 000 propriétaires. Donc, les propriétaires sont pas tous assidus des changements ou des évolutions et de l’actualisation des lois. En ça c’est un défi. Et c’est pour ça qu’on milite même auprès du gouvernement éventuellement pour qu’il y ait des ressources financières, destinées à de la formation de l’accompagnement, de l’appui aux propriétaires, parce que lorsqu’on apporte des modifications ou des objectifs à atteindre comme vous venez de le nommer, ben, ça se fait pas par magie.
-Non ! Je prévois beaucoup de chaos dans ce changement !
-Exactement ! Donc, c’est pour ça qu’il faut agir en amont, c’est par l’accompagnement. Et moi, j’aurais envie de dire qu’on peut bien se donner des dates, des objectifs, ceci ou cela. Mais il faut se donner un cadre de mise en œuvre de ces politiques et de ces changements. Et ça, là-dessus, on a tendance à minimiser l’importance, là-dessus. Alors moi, j’aurais tendance à dire, oui, je suis inquiet parce qu’on ne consacre peut-être pas les énergies à l’accompagnement des propriétaires, à cet effet.
-Il y a toujours plusieurs façons de voir la même chose. En parlant de ESG et spécifiquement, en parlant de « E » ; Environnement, donc actuellement, il y a aussi le programme de APH Select qui vient donner un coup de main aux propriétaires d’immeubles locatifs. Justement aussi, ils font des changements, des améliorations pour la condition énergétique. Ça peut donner aussi un bon impact dans le rendement financier et aussi énergétique. Et aussi la qualité de vie des locataires.
-Moi, je veux d’abord saluer la Société Canadienne d’Hypothèques et de Logement innove toujours avec des nouveaux programmes. APH Select en étant un bel exemple, récemment. Beaucoup de constructeurs, de propriétaires vont les utiliser. Et ils fixent des objectifs qui concordent avec les priorités de la société québécoise et canadienne, donc développement durable, l’environnement. Ce que je trouve intéressant, c’est que dans la lutte pour le changement climatique, dans cet objectif de mobiliser l’efficience énergétique, les bénéfices, ils sont pour tout le monde. D’abord pour la société, on le savait déjà. Mais comme propriétaire, c’est un investissement qui est important. C’est une mise en valeur, c’est un engagement qui est grand. Mais aussi pour les locataires, il y a un bénéfice. Parce que 75% des locataires paient les frais de chauffage. Alors, quand on travaille à remettre à niveau nos logements, surtout avec des objectifs au niveau de l’efficience énergétique, ben c’est aussi le portefeuille du locataire qui en bénéficie. Or, ce sont des stratégies qui sont gagnantes. Mais pour ça il faut multiplier les mesures, il faut multiplier l’aide directement aux propriétaires, parce qu’en même temps, on diminue l’impact sur le prix du loyer et des charges parallèles comme l’énergie. On est dans une solution gagnante pour tout le monde.
-Tout ça, ça me semble… Tout ce que j’entends ça fait du gros pensant ! Mais le comment y arriver ?
-Il faut multiplier ces programmes-là. Parce que souvent les enveloppes budgétaires sont pas toujours suffisantes, sont limitées. Mais ce virage-là, il faut pas juste le prendre pour nos enfants, puis les sociétés à venir. Il y a des gains pour tout le monde. Et donc, à mon avis, il va falloir, notamment la Ville de Montréal s’est donné des objectifs, à cet effet-là. Mais, nous notre inquiétude, c’est que les enveloppes budgétaires n’accompagnent peut-être pas, sont insuffisantes. Et à notre avis, on devrait se donner des priorités. Comme par exemple, on pourrait commencer par les bâtiments construits avant 1980. Dans 2-3 ans, on va prendre ceux de 1985 et moins. Puis, 90. Voyez, on va y aller progressivement, et on rejoint, là où il y a une zone de gain important. Alors ça, il faut que les politiques publiques soient plus agressives sur ces éléments-là. Alors, on fait les représentations puis, on espère que les gens écoutent aujourd’hui, puis, vont peut-être retenir l’importance de ce genre de proposition.
-Tout à fait, tout à fait et c’est pourquoi, je fais cette émission pour le Franc-Parler avec mes invités. Merci beaucoup de votre passage et aussi pour terminer, je voudrais connaître quel est votre souhait pour notre société et pour la génération à venir ?
-Je pense mon plus grand souhait, d’abord en habitation, on veut que tout le monde puisse se loger convenablement dans le meilleur environnement. On vit de grands défis, en ce moment, on est à une croisée des chemins dans le secteur de l’habitation. Alors, moi ce que je souhaite, c’est que, d’abord, tout le monde soit à la même table. Qu’on soit public, privé, quelque soit la mission qu’on a, on a un devoir de livrer et d’offrir des logements pour tout le monde. Évidemment, ça vient avec toute sorte de défis. Mais à partir du moment où les gens travaillent ensemble, collaborent à un même objectif, comme société, on va être pas mal gagnant dans l’avenir. Alors moi, je me lève chaque matin, en me disant que je contribue à cet objectif-là !
-Absolument, merci beaucoup !
-Et donc, voilà.
-Oui, alors c’est en communication qu’on trouve des solutions et des actions, n’est-ce pas ? Merci à vous de nous écouter ! À la prochaine.
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